Reconstruction de sources mécaniques dans le domaine temporel
Dans la plupart des problèmes de contrôle des vibrations, la connaissance et la hiérarchisation des différentes sources d'excitation est fondamentale. Cette connaissance permet, d'une part, d'envisager un contrôle à la source et, d'autre part, de ne réaliser sur la structure que les modifications nécessaires, ce qui induit un gain de temps et d'argent. Sur une structure industrielle, une telle information est souvent difficile, voire impossible, à obtenir. Une alternative possible pour contourner cette difficulté consiste à identifier les sources de manière indirecte à partir de la mesure du champ vibratoire à la surface de la structure. On cherche donc à déterminer les causes à partir des effets. C'est pourquoi, ce type de problème est généralement qualifié de problème inverse.
Au cours des trois dernières décennies, de nombreuses méthodes ont été développées pour résoudre ce problème inverse. L'utilisation d'une méthode ou d'une autre dépend essentiellement du problème traité, mais aussi et surtout du temps et des ressources (personnel, instrumentation, argent, ...) disponibles, de l'expertise de l'entreprise et de la précision requise.
D'une manière générale, on peut classer les différentes méthodes développées en deux catégories : les méthodes fréquentielles et temporelles. Ces deux types de méthodes sont complémentaires, puisque les méthodes fréquentielles permettent d'identifier des sources stationnaires, tandis que les méthodes temporelles sont plus adaptées à l'identification de sources transitoires (choc, source mobile, ...). Dans le cadre de ce projet, réalisé en collaboration avec le Centre national d'études spatiales (Cnes), nous nous sommes intéressés à la reconstruction des sources d'excitation mécanique dans le domaine temporel à partir de données cinématiques (déplacement, vitesse, accélération) mesurées à la surface de la structure considérée. Parmi toutes les problématiques associées à ce vaste champ de recherche, nous avons focalisé nos efforts sur trois problématiques particulières :
1 - Construction du modèle dynamique de la structure
Quelque soit l'approche envisagée, la définition du modèle dynamique est l'un des éléments clés du succès de la résolution du problème d'identification. En effet, dans la littérature dédiée, la construction de ces modèles repose généralement sur l'hypothèse que l'excitation est constante sur un pas de temps. De ce fait, pour que le modèle soit représentatif du comportement dynamique du système, il faut que le pas de temps choisi pour la discrétisation temporelle soit suffisamment petit. Pour pallier ce problème, nous avons proposé de construire le modèle dynamique à partir d'une représentation d'état discrétisée du système basée sur la méthode α-généralisée, qui est un schéma d'intégration temporelle qui présente l'avantage d'être inconditionnellement stable et de posséder une précision du second ordre.
2 - Approches par régularisation
Les approches utilisées dans le domaine temporel, comme la régularisation en norme L2 (Tikhonov) ou en norme L1 (LASSO), peuvent conduire à des reconstructions imprécises lorsque les sources à identifier ne partagent pas les mêmes caractéristiques spatiales et temporelles ou que le vecteur d'excitation n'a pas les caractéristiques voulues. Dans ce cas, il est important d'exploiter au mieux les informations dont on dispose a priori sur la nature des signaux d'excitation et sur la distribution spatiale des sources pour pouvoir améliorer la qualité des résultats obtenus. Pour répondre à cette exigence, nous avons introduit la régularisation multiplicative espace-temps, qui est une régularisation en norme mixte Lp,q.
3 - Filtre de Kalman
Les filtres de type Kalman sont maintenant utilisés depuis une vingtaine d'années en dynamique des structures pour estimer conjointement l'état et la commande (l'excitation) d'un système mécanique. L'un des points clés de ces stratégies est généralement le choix des paramètres de réglage du filtre. Bien que certains critères a posteriori commencent à émerger, cette problématique n'a été abordée que superficiellement dans la littérature. Il a notamment été montré que la norme de l'innovation pouvait être utilisée à cette fin. Plus précisément, les meilleures estimations sont obtenues pour les paramètres de réglage minimisant la moyenne quadratique de l'innovation. Cependant, à notre connaissance, la pertinence de cet indicateur n'a pas été expliquée à partir d'arguments théoriques. Ce point particulier a retenu toute notre attention et a fait l'objet d'une étude spécifique.
D'autre part, certains auteurs ont proposé un ensemble de règles, dérivées de la théorie du contrôle, qui garantissent l'identifiabilité, la stabilité et l'unicité des quantités estimées. Malheureusement, ces règles ne permettent pas d'assurer le succès de l'estimation en présence de bruit, car elles établissent la faisabilité du processus d'inversion pour une configuration expérimentale donnée (position, nombre et type de capteurs) d'un point de vue algorithmique uniquement. Aussi, nous nous sommes intéressés à l'applicabilité des approches de type Kalman dans certaines situations rencontrées assez fréquemment en pratique, à savoir :
- Les données cinématiques mesurées sont-elles équivalentes du point de vue de l'identification ?
- L'identification temps-réel est-elle possible ?
- Les mesures doivent-elles être colocalisées avec les excitations ?
Partenariats académiques et industriels : Centre national d'études spatiales (Cnes)